Baron Marc André Lévesque répond à Claude Gauvreau

Baron Marc André Lévesque répond à Claude Gauvreau

Échos à la Nuit de la poésie 1970

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Des poètes contemporain(e)s répondent, avec un demi-siècle d’écart, aux performances de poètes présent(e)s lors de la Nuit de la poésie 1970.

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La poésie ludique de Baron Marc-André Lévesque résonne avec la langue exploréenne de Claude Gauvreau. Réalisation de la vidéo : Baron Marc-André Lévesque

Performance originale de Claude Gauvreau lors de la Nuit de la poésie 1970 

Une production de L'ICQ / Québec en toutes lettres

L’ICQ et Québec en toutes lettres remercient l'Office national du film du Canada (ONF) pour sa collaboration à Échos à la Nuit de la poésie 1970 ainsi que la Ville de Québec, le Conseil des arts du Canada, le Consulat général de France à Québec, le Gouvernement du Québec, Patrimoine Canadien, la Caisse Desjardins de Québec et les autres précieux partenaires pour leur contribution à la réalisation du festival.

Notice contextuelle sur la performance de Claude Gauvreau :
Ce jour-là, Claude Gauvreau serait arrivé au théâtre Gesù vers 9 heures du matin. Quand on lui demande comment il se sent, quand il doit réciter ses textes, Gauvreau dit : « Une angoisse épouvantable pendant au moins quinze jours, avant la performance, puisqu’il s’agit d’une espèce d’acrobatie athlétique. Ensuite, c’est un moment de griserie… la profération elle-même des objets… le fait de relever un défi, un défi difficile dans mon cas… et ensuite, une fois les objets dits, une fois la libération du public… une très grande détente, un état d’euphorie et une très grande joie. » Il faut préciser que, parmi tous les poètes invités, Gauvreau est un géant un peu étrange et anachronique. Écrits vers la fin des années 1940, les textes en langue exploréenne qu’il livre au public sont tirés de ses premiers livres, Entrailles et Étal mixte, qui sont, avec Le vierge incendié de Paul-Marie Lapointe (qu’il a d’ailleurs préfacé), les exemples les plus radicaux d’une poésie inspirée par le mouvement automatiste. L’exploréen représente rien de moins qu’une écriture abstraite, une composition sonore de néologismes mêlés à des mots courants détournés de leur sens, portée par un lyrisme grave et primitif. Anticipant la réaction d’une foule déjà indisciplinée, Gauvreau y va d’un avertissement : « Mes apports à La Nuit de la poésie sont de diverses époques, mais ils sont tous à fort accent non-figuratifs. » Si les premiers extraits provoquent un vif enthousiasme, peu à peu le malaise s’installe. L’histoire a surtout retenu les rires, quelques huées. Gauvreau aussi semble ambivalent, même s’il considère que le « public de Montréal est certainement le plus réceptif [qu’il a] eu à affronter ». Encouragé par Gérald Godin, il revient sur scène pour déclarer : « Je suis activement sifflé. Ce qui prouve que l’esprit créateur n’est pas un mot d’ordre au Québec. Et d’ailleurs, vive le Québec, vive la création, vive l’universel. » Il en ressort bien droit, sous des acclamations qui ne laissent aucun doute sur son triomphe, même s’il l’aurait voulu moins mitigé. À l’évidence, Gauvreau se fait une idée assez haute de son projet poétique, n’hésitant pas à affirmer aux jeunes interlocuteurs rassemblés autour de lui qu’il peut raisonnablement aspirer à être un poète majeur, voire le plus grand de tous les temps. Cette prétention, on l’a un peu exagérée, on en a fait la preuve d’une pauvre mégalomanie, un signe annonciateur de la folie qui le mènerait au suicide un peu plus d’un an plus tard (en fait, il serait tombé du toit de son immeuble, victime d’une insolation). Ce soir-là pourtant, après sa performance, Gauvreau est serein et s’exprime avec un détachement étonnant. Pierre Morency retiendra de sa conversation avec lui qu’il « était un homme d’une grande noblesse et d’une parfaite civilité ». Bombardé de questions, contredit par quelques têtes fortes, Gauvreau répond néanmoins généreusement, avec précision, sobriété, amusement, comme un professeur, le pédagogue d’une vision magique et instinctive des mots et du monde.
- Vincent Lambert

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